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LA PÂTISSERIE AU PROFIT DE LA SOLIDARITÉ

29 mars 2019

LA PÂTISSERIE AU PROFIT DE LA SOLIDARITÉ

« Délices de mon pays » est une initiative d’économie sociale et solidaire née à Casablanca en 2016 et appuyée par notre partenaire AFAQ (Action Femmes des Associations des Quartiers du Grand Casablanca). Aujourd’hui, elle compte plus de 50 membres. Parmi eux, Ibrahima Mohammed Soumah, originaire de Guinée-Conakry. Il nous a confié son histoire, compliquée certes, mais pleine d’espoir.

Dimanche 17 février 2019. Il est midi à Hay Essadri, quartier défavorisé du sud de Casablanca. Sur l’enseigne de la coopérative, nous lisons : « Chhiwate Bladi : pâtisserie, boulangerie, chocolaterie, traiteur ». Le logo représente une femme avec un chapeau de pâtissière, un petit gâteau à la main. Les pâtisseries marocaines sont exposées dans de jolis paniers derrière le comptoir. Ça sent le pain, on devine qu’il sort à peine du four. Dans « les coulisses », la cuisine dans la pièce arrière, cinq femmes et un jeune homme travaillent. Il∙Elle∙s préparent le goûter pour la première édition du Forum international de la parité et de l’économie sociale et solidaire, organisé par AFAQ. « Soyez les bienvenues ! Ça, c’est le petit nouveau dont je vous parlais », nous dit en souriant Mounia, coordinatrice du projet.

Ibrahima a quitté son pays pour des raisons familiales et par manque de travail, malgré son diplôme d’informaticien. Il est arrivé au Maroc par les airs y retrouver un ami. Son périple a été long, plein de péripéties. Il a d’abord perdu son passeport, puis s’est fait arnaquer par plusieurs chauffeurs de taxi. Il a fini par perdre une grosse partie de son argent. Quelques jours plus tard, enfin arrivé à destination, il a retrouvé son ami pour se rendre compte qu’il n’en était pas vraiment un… En effet, celui-ci a profité de lui pour se faire inviter à plusieurs reprises ; quand il a réalisé que l’argent d’Ibrahima se tarissait, il l’a chassé de la chambre qu’il lui avait cédée et lui a demandé de s’installer désormais dans le garage...

Ibrahima cherchait désespérément du travail lorsqu’en se promenant dans le quartier, il a découvert « Délices de mon pays ». C’était le 9 janvier. Les femmes l’ont chaleureusement accueilli ; il y a rapidement commencé un stage de formation en pâtisserie. « Ici, je suis comme chez moi. On me traite bien. Il n’y a pas de patron, nous sommes tous des collègues », nous confie Ibrahima. Un soir, tard, Saida, membre de la coopérative, l’a vu dormir dans un magasin. La situation chez son « ami » était devenue insoutenable, à tel point qu’il essayait d’y passer le moins de temps possible. Saida lui a proposé de le loger provisoirement au-dessus de l’atelier. « Nous, on ne va pas t’abandonner » lui a-t-elle promis. Cette phrase qui résonne dans sa tête, il ne l’oubliera jamais. Aujourd’hui, Ibrahima est sur le point de finir son stage, il sera donc bientôt rémunéré. Il habite un petit appartement pour lequel les membres de la coopérative cotisent en attendant qu’il touche son premier salaire. Quand je lui demande ce qu’il aimerait dire aux femmes à travers cet article il me répond : « La confiance que vous m’avez accordée, je ne vais jamais la trahir ».

Femmes divorcées, veuves, jeunes mères célibataires, réfugié·e·s arrivé·e·s au Maroc pour un meilleur lendemain… Il·elle·s ont tou·te·s des histoires compliquées, mais se sont serré les coudes, se sont entraidé·e·s pour aller de l’avant. « Délices de mon pays » leur a permis de s’émanciper, de bénéficier de conditions de travail dignes, d’un accès à la protection sociale… de transformer le goût amer de la vie en sucrerie, telle une pâtisserie marocaine !

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