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DEVOIR DE VIGILANCE : UN COMBAT POLITIQUE

22 octobre 2021

DEVOIR DE VIGILANCE : UN COMBAT POLITIQUE

Tags : Devoir de vigilance | RDC | Travail décent

D’après une étude commandée par Enabel, plus de 80% des Belges sont pour la mise en place d’une loi qui obligerait les entreprises à prendre des mesures afin d’éviter les violations des droits humains et pour éviter les dommages environnementaux tout au long de leurs chaines d’approvisionnement.

Creuseurs artisanaux, dans la province du Katanga en République Démocratique du Congo  © Johanna de Tessières / Solsoc

Stop business impunity !

Le 24 Avril 2013 au Bangladesh, l’usine du Rana Plaza s’effondre et cause la mort de 1138 ouvrier·e·s du textile. 2000 autres personnes sont blessé·e·s. Ces ouvrier·e·s confectionnaient des vêtements pour le compte de grandes marques internationales que des millions de personnes portent chaque jour à travers le monde. Il s’agit entre autre des marques H&M, Zara, Primark….

Des cas médiatisés tels que le drame du Rana Plaza ou les catastrophes environnementales causés par des compagnies pétrolières ont marqués les esprits et continuent de mobiliser les organisations de la société civile à travers le monde pour que cesse l’impunité des multinationales et que les victimes aient accès à la justice.

Bike Ride #Stop Business Impunity organisé le 24 avril 2021 par achAct pour commémorer le drame du Rana Plaza et promouvoir la nécessité d’une loi belge sur le Devoir de Vigilance.

Opacité, complexité, irresponsabilité, impunité

Les chaines de valeur internationales sont caractérisées par un manque de transparence, des structures de plus en plus complexes des entreprises. Ainsi comme le souligne l’OCDE, « un smartphone assemblé en Chine peut inclure des éléments de conception graphique en provenance des États-Unis, du code informatique élaboré en France, des puces électroniques fabriquées à Singapour et des métaux précieux extraits en Bolivie ».

Toutes ces caractéristiques ont pour conséquences de rendre impossible la mise en cause de la responsabilité des entreprises au sein de leurs chaines de valeurs. En effet, les multinationales mènent des activités dans plusieurs pays, elles sont organisées en groupe de sociétés et répartissent leurs activités en plusieurs entités (sous-traitants, fournisseurs, partenaires commerciaux …) souvent soumises à plusieurs juridictions. Toutes ces spécificités des chaines de valeurs internationales constituent des obstacles majeurs pour l’accès à la justice et à la réparation des victimes. Dans certains États, le respect des droits humains, des normes du travail et des normes environnementales n’est pas garanti par les juridictions et les législations. Les multinationales en profitent pour tirer de cette situation, des profits et des avantages compétitifs. Cela induit de fait, une concurrence déloyale avec des entreprises plus responsables.

De plus, les organisations de la société civiles mobilisées sur ces questions constatent amèrement que les pratiques commerciales responsables volontaires ne sont malheureusement pas assez répandues. Il est donc essentiel et urgent de mettre en place des cadres légaux contraignants qui obligeraient les entreprises à se responsabiliser et à s’assurer de respecter les droits humains et de l’environnement !

Creuseurs artisanaux, dans la province du Katanga en République Démocratique du Congo  © Johanna de Tessières / Solsoc

Le devoir de vigilance, en deux mots

Le devoir de vigilance est l’obligation pour les entreprises d’adopter une conduite responsable dans toutes ses activités, de prévenir les risques sociétaux et environnementaux et donc de respecter la norme de diligence raisonnable. La diligence raisonnable implique de mettre en place des mécanismes de prévention, d’atténuation, d’arrêt des violations. Le devoir de vigilance implique aussi de réparer les dommages causés : il s’agit du devoir de réparation. En effet, dans le cas d’un dommage, si des insuffisances sont constatées dans les prises de précautions, les entreprises doivent indemniser les victimes et réparer les dommages.

Creuseurs artisanaux, dans la province du Katanga en République Démocratique du Congo  © Johanna de Tessières / Solsoc

Devoir de vigilance : pour une loi belge

Une loi sur le devoir de vigilance a été adoptée en France en février 2017. Plusieurs pays européens se sont inspirés de cette initiative pour s’engager dans un processus parlementaire ou gouvernemental ayant pour objectif une législation, tels que l’Autriche, la Finlande, l’Allemagne, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Norvège. Dans certains pays, tels que la Belgique, des coupoles d’organisations de la société civile ont lancé des initiatives communes ou des campagnes pour pousser leur pays à légiférer. Ainsi la coalition Corporate Accountability dont Solsoc fait partie et qui rassemble plusieurs ONG belges, les coupoles CNCD 11.11.11, 1.11.11 et les principaux syndicats ont rédigé un mémorandum sur les « Fondements essentiels pour une loi belge sur le devoir de vigilance ». La coalition mène depuis plusieurs années un travail continu de plaidoyer pour qu’une loi sur le devoir de vigilance soit adopté en Belgique.

Le 22 avril 2021, la veille de la commémoration du drame du Rana Plaza, une proposition de loi belge sur le devoir de vigilance a été prise en considération au Parlement. Ce texte, à l’initiative du Groupe PS à la Chambre et soutenu par Vooruit, Ecolo et le CD&V reprend des éléments du mémorandum des organisations de la société civile belge mobilisées sur le devoir de vigilance. Plusieurs acteurs et expert.e.s ont rendus leur avis sur la proposition de loi, à l’écrit ou lors d’auditions, notamment le rapporteur spécial de l’ONU Olivier De Schutter, des représentant·e·s de la coalition Corporate Accountability, des représentant·e·s des principaux syndicats dont la FGTB ainsi que l’organisation colombienne IPC, partenaire de Solsoc, qui a rendu un avis écrit sur le texte.

Creuseurs artisanaux, dans la province du Katanga en République Démocratique du Congo  © Johanna de Tessières / Solsoc

Devoir de vigilance : mobilisations solidaires et internationales

Aux côtés de ces partenaires belges et internationaux, Solsoc travaille sur la responsabilité des entreprises et des enjeux liés au devoir de vigilance depuis de nombreuses années. La mise en lumière des conditions dramatiques dans lesquelles travaillent les mineurs artisanaux en RDC par le biais le web-reportage de Solsoc « Sans terre, sans droits, les creuseurs du Katanga » s’inscrit dans la nécessité de dénoncer tout un système informel lié à l’industrie minière dans lequel le travail décent n’existe pas et où des vies humaines sont mises en danger.

Sur ces même problématiques, Présence et Action culturelles (PAC) et Solsoc ont développé un outil ludique et instructif, le « jeu de la ficelle décolonial ». À partir d’un objet du quotidien, un téléphone portable, PAC et Solsoc proposent d'interroger la relation entre la Belgique et le Congo à travers l’exploitation des ressources par les compagnies minière et l’histoire coloniale. En matière d’expertise, tout récemment Solsoc, FOS, IFSI et leurs organisations partenaires en Colombie ont lancé avec le CETRI-Centre tricontinental une étude ayant pour objectif de mettre en évidence le point de vue des syndicalistes et organisations de la société civile colombiennes sur les initiatives visant à établir le devoir de vigilance, mais aussi l’accessibilité de ces mécanismes pour les communautés dans un contexte extrêmement hostile pour les syndicalistes, les défenseur·euse·s des droits humains et de l’environnement. Cette solidarité internationale, ce plaidoyer commun pour responsabiliser les entreprises en matière de respect des droits humains et de l’environnement rejoint notre combat pour qu’à travers le monde, les gouvernements se comportent de manière responsable en s’engageant eux aussi plus fermement en faveur du Travail décent.

Illustrations 1,,3,4,5 : Creuseurs artisanaux, dans la province du Katanga en République Démocratique du Congo  © Johanna de Tessières / Solsoc 

Illustration 6 : Coupeur de canne à sucre, en Colombie, travaillant dans des conditions de travail proches de l’esclavage. © Ioanna Gimnopoulou / Solsoc 

 

 

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