Une société civile forte et indépendante est une composante essentielle d’un système démocratique sain. Pourtant, ces dernières années, un nombre croissant d’organisations partout dans le monde dénoncent les enfreintes à leur liberté d’association, de rassemblement ou d’expression, mais aussi leur difficultés d’accès aux financements, ou les barrières administratives. Ces entraves font partie du « rétrécissement de l'espace » de la société civile ou « shrinking space ». Si le phénomène n’est pas nouveau, la société civile, de plus en plus consciente, cherche à s’organiser pour y apporter une réponse concertée. Solsoc s’est penchée sur ce phénomène et a interrogé son réseau de partenaires afin de savoir si eux aussi subissaient ces menaces.

Ces entraves font partie du « rétrécissement de l'espace » de la société civile ou « shrinking space ». Si le phénomène n’est pas nouveau, la société civile, de plus en plus consciente, cherche à s’organiser pour y apporter une réponse concertée. Solsoc s’est penchée sur ce phénomène et a interrogé son réseau de partenaires afin de savoir si eux aussi subissaient ces menaces.

Personnes disparues ou assassinées dans le cadre du conflit armé. Granada, Colombie © Solsoc 2016.

Quand on interroge les organisations partenaires de Solsoc, toutes relèvent au moins une tendance au rétrécissement de leur espace civique. Elles citent principalement de sérieuses difficultés d’accès aux financements, allant parfois jusqu’à des ruptures de subsides, un manque de soutien de l’État, des lenteurs dans la signature de certains documents fondamentaux à leur bon fonctionnement et à leur travail. Dans les contextes politiques les plus complexes, une (auto-)restrictrion de leur liberté d’expression, des difficultés de mouvement et de déplacements vers certaines zones du territoire dans lesquelles ils ont des activités, des intimidations voire des attaques sont relatées. Et puis, dans les contextes de conflit armé, comme en Palestine ou en Colombie, des craintes existent pour la sécurité des travailleur·euse·s et des leader·euse·s sociaux·ales.

Des politiques et des procédures qui imposent des restrictions à la liberté de réunion et d'association : le cas du Maroc

Au Maroc, le roi Mohammed VI maintenait depuis sa succession à son père, Hassan II, un rythme prudent de réformes afin de sortir des années de répression. Pourtant, suite aux mouvements populaires du 20 février 2011, les réformes ont été brutalement freinées et depuis lors le gouvernement est même revenu sur un certain nombre d’entre elles. Aujourd’hui, manifestation du shrinking space que vivent les associations marocaines, nombre d’entre elles n’ont toujours pas reçu le récépissé final de leur dossier juridique de création d’association, en particulier celles qui défendent l’intégrité de la société civile et ne s’alignent pas avec les choix politique de l’état. Pourtant, ce récépissé est essentiel pour ouvrir un compte en banque au nom de l’association, inscrire ses travailleur·euses·s salarié·e·s à la caisse nationale de sécurité sociale, obtenir des financements publics ou internationaux ou encore recevoir les autorisations obligatoires des autorités locales pour l’organisation d’évènements. 

Le shrinking space, un instrument de l’occupation en Palestine

Dans le cas des organisations de la société civile palestiniennes telles que celles soutenues par les ONGs belges dont Solsoc, le shrinking space résulte à la fois du harcèlement, parfois violent, mené par le gouvernement israélien et ses soutiens, mais également du régime de l’Autorité palestinienne en Cisjordanie et de la politique du Hamas en vigueur dans la Bande de Gaza. Ces derniers aussi répriment durement et parfois violemment, la liberté d’expression. Ce phénomène qui tend à s’aggraver avec le temps met nos partenaires devant des difficultés existentielles telles que des détentions administratives des responsables des organisations palestiniennes et des leaders sociaux membres des initiatives soutenues par le programme, une décrédibilisation et une criminalisation des organisations de la société civile palestinienne via des campagnes de diffamation. Les organisations sont alors désignées comme terroristes par le gouvernement israélien comme il l’a fait en octobre 2021 vis-à-vis de 7 ONGs de défense des droits humains, avec pour effet une méfiance grandissante des bailleurs de fonds qui, souvent diminuent, voire retirent, les financements octroyés à celles-ci. Enfin, de régulières entraves au bon fonctionnement sont rapportées, telles que des difficultés bureaucratiques ou administratives au quotidien (ralentissements dans les processus d’accès aux financements, financements conditionnels, difficultés avec les banques).

Le 18 août 2022, l’armée israélienne a opéré un raid dans les bureaux de sept grandes organisations palestiniennes à Ramallah qualifiées "d’organisations terroristes", sans fournir de preuves. Après avoir mené leurs propres enquêtes, les États membres de l’UE, dont la Belgique, ont qualifié les déclarations israéliennes d’infondées.  

Restons vigilants et solidaires ! 

Dans trop de pays du monde, exercer une activité syndicale, militante, de défense des droits humains ou environnementaux est un combat de chaque jour, où tout peut basculer. Il est donc primordial pour Solsoc et tout son réseau de partenaires de rester particulièrement vigilants dans l’ensemble des pays du programme. Ensemble, le réseau continue et continuera de se battre pour défendre les sociétés civiles et la démocratie afin qu’elles puissent continuer à exercer leurs missions, essentielles pour espérer des lendemains meilleurs. Pour ce faire, nous agissons en Belgique et directement dans chacun des pays d’abord en maintenant nos partenariats, mais aussi en faisant pression sur les décideurs et en rejoignant des coalitions d’organisations, parce qu’ensemble, on est plus fort !